En 2008, les jeux vidéos péchus se déroulant dans l’espace ne garnissaient pas vraiment les rayons. Et le genre du survival horror ne tenait plus qu’à la franchise Resident Evil, alors déclinante, la série Silent Hill s’étant vu boudée par les gamers, plus habitués à shooter des monstres qu’à se prendre la tête sur des intrigues psychologiques. Côté science-fiction, les trois jeux horrifiques à faire référence restaient l’antique System Shock (1994), l’imparfait Doom 3 (2003) et l’uchronique BioShock (2007). C’est alors que pouf pouf comme ça, EA Games nous pondit ce Dead Space sorti un peu de nulle part. Un survival horror en third person shooter, plus proche de Resident Evil 4 dans son système de jeu que de la first person tuerie Doom. Et le jeu fit clairement la différence. Les déçus de Doom 3 y trouvèrent leur nouvelle référence et le jeu devint un hit de vente, engendrant dans son sillage, spin-off en comics et film d’animation.

Pourtant l’histoire du jeu n’a rien de révolutionnaire. L’intrigue prend place en 2508 (donc pas tout à fait après-demain). Dans ce futur lointain, l’humanité a épuisé toutes les ressources terrestres (incroyable qu’elle ait tenue si longtemps vu le climat actuel) et cherche à coloniser d’autres planètes. Des vaisseaux “brise-surface” sont censés extraire des matières premières d’autres planètes, même si cela implique de les détruire (ben ouais, on a déjà flingué une planète, pourquoi s’emmerder à respecter les autres). C’est dans ce contexte que l’un de ces vaisseaux, l’USG Ishimura, perd le contact avec le restant de l’humanité. Une mission de secours est alors envoyée sur le vaisseau, mission dont vous, Isaac Clarke (Isaac Asimov, Arthur C. Clarke, rhô l’hommage de fou pas très subtil !), jeune ingénieur en mal d’amour, faites partie. À votre arrivée, vous découvrez rapidement un vaisseau fantôme, vidé de ses occupants humains, mais plein de créatures nécromorphes toutes droit sorties du film The Thing ou d’une description “indicible” d’un livre de Lovecraft. Jeune et con comme vous êtes, vous voilà séparé de vos compagnons et obligé d’explorer seul le vaisseau à la recherche de votre épouse, qui faisait partie de l’équipage de l’Ishimura. Quelques incompréhensions et autres écarts de conduite avec les créatures et une phase bien casse-couille de tir sur astéroïdes plus tard, vous voilà esclave de la gravité, à essayer de comprendre comment un monolithe inconnu a pu changer tout le monde en vilaines gloumoutes pas fana des politesses.

Une maniabilité rêvée, un level design d’enfer, une intrigue qui bouffe à tous les râteliers (on y trouve des références à The Thing, Alien, Event Horizon et même Planète hurlante), Dead Space s’imposait en son temps comme le digne successeur du génial Resident Evil 4, à l’inverse d’un Resident Evil 5 très décevant, sorti un an plus tard. Bourré de qualités, de phases bien stressantes et d’une atmosphère futuriste aussi noire que celle du film Alien 3, le jeu de Visceral Games contribua pour beaucoup à relancer le genre moribond du survival horror, alors que son succès appela non seulement la production de deux suites (une première excellente, l’autre plus décevante) et deux DLC, mais aussi l’émergence de nouveaux titres d’horreur et de SF horrifique (The Evil Within, Alien Isolation) tout en obligeant certaines sagas à se dépasser (Resident Evil 7, Doom Ultimate). Impossible de passer outre ce standard de la SF vidéoludique, qui eut d’ailleurs récemment droit à son remake sur PS5 (Isaac n’y est plus aussi taiseux).

Alors n’hésitez pas, que ce soit à l’occasion sur PS3 ou tout neuf sur une PS5 toute rutilante, replongez dans ce vaisseau bourré de corridors mal éclairés, de gravité capricieuse et de silhouettes immondes. Revêtez l’amure et le heaume customisables d’Isaac Clarke et allez démembrer quelques vilaines teignasses de l’espace à coups de chatouilles et de tronçonneuse laser. S’il en reste l’impression d’avoir déjà vu un film du même type, au moins vous pourrez y vérifier si, dans l’espace, quelqu’un, quelque-part, vous entend crier.

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