Soyons francs, la saga Halloween, niveau continuité, c’est le bordel. Entre les multiples résurrections de son boogeyman, des suites sans intérêt, le retour et la mort de Laurie Strode, les deux remakes de Rob Zombie et le re(re)retour de Laurie Strode, on n’y comprend plus rien. Simplement parce que la franchise est passée de producteurs en producteurs (les Akkad, de Laurentiis, Weinstein, Blum) tous pressés de pisser dessus pour marquer leur propriété et rentabiliser leur achat.

En 2018, David Gordon Green et son pote Danny McBride nous teasaient le (re)(re)(re)retour de Michael Myers en faisant comme leurs compadres des franchises Terminator et Jurassic World : leur film serait une suite au film original et ignorerait royalement les neuf films qui lui ont fait suite. Ils essayèrent de créer l’événement en promettant une suite bien meilleure que toutes les autres avec une Laurie Strode et un Michael Myers quasi septuagénaires (?) et plus du tout frère et sœur (pour ce que ça change…). Bref, la connerie hollywoodienne à l’état pur avec un duo de fanboys en guise d’auteurs et qui nous promettaient de respecter la franchise mieux que tous leurs prédécesseurs. A l’arrivée, ils nous pondirent un film qui ne réinventait en aucune façon la saga, Halloween 2018 ayant tôt fait de délaisser son approche thriller pour se transformer en énième slasher gore et bas du front comme il y en a eu une bonne centaine depuis les années 80. Annoncé comme le premier opus d’une nouvelle trilogie, cet Halloween fut encensé alors qu’il n’avait pas la moitié de la créativité dont a fait preuve Rob Zombie sur son mésestimé Halloween 2 et valait moins que l’efficace simplicité du Halloween 20 ans après de Steve Miner.

Sorti trois ans après, au lendemain de la pandémie de covid, Halloween Kills du même trio d’auteurs se présente comme une suite directe du précédent film. Un peu à la manière du Halloween 2 de Rosenthal qui faisait directement suite au chef d’œuvre de Carpenter : même unité de lieu (Haddonfield), même unité de temps (la nuit d’Halloween). La différence étant ici dans le traitement : Halloween Kills propose de confronter directement Myers, non plus à des victimes isolées et trop faciles à zigouiller, mais à la colère populaire d’une petite bourgade bien décidée à le lyncher façon monstre de Frankenstein. Le seul problème, c’est que c’est Michael Myers : les gens qui veulent le tuer lui font aussi peur qu’une meute de roquets sous ecsta.

Certes, l’idée de confronter enfin le monstre à une sorte de tribunal populaire avait de quoi faire saliver les fans du premier film. D’autant plus que cela promettait une approche inédite du mythe Michael Myers notamment grâce à quelques flashbacks revenant sur la nuit de la capture de Myers en 1978. Et ça aurait été probablement très jouissif si les auteurs du film avaient su éviter tous les écueils propre au genre : la surenchère gratuite dans le gore (rappelons que l’original de Carpenter ne versait jamais dans le gore), une flopée de personnages secondaires juste là pour se faire tuer, ces même personnages qui adoptent les réactions les plus débiles possibles face au tueur…

A ce titre, il est important de souligner qu’Halloween Kills est le premier film de l’histoire du cinéma présentant une ville dont l’ensemble de la population semble avoir un QI moyen n’excédant pas les 70. Souvent pointés du doigt pour la bêtise de ses victimes hurlantes aux gros boobs, les slashers ont souvent été l’objet de critiques et de parodies justifiées (Scary Movie). Uniquement peuplé d’abrutis, Halloween Kills ne fait rien pour contredire cette tendance : une unité entière de pompiers armés de haches et de scies à métaux affrontent ensemble un tueur qui parvient sans le moindre mal à tous les zigouiller, un couple de gays s’amusent à faire flipper des gosses avant de se faire trucider par le tueur dont ils vantent les exploits meurtriers, un couple de vieux joue avec un drone miniature dans leur salon en pleine nuit plutôt que de regarder Patrick Sébastien à la télé, une équipée d’imbéciles armés de flingues préfèrent s’enfermer dans leur caisse plutôt que de prendre un instant pour viser correctement le psychopathe qui s’approche à dix mètres de là et le descendre, une populace hystérique poursuit un vieux fêlé aussi chétif qu’inoffensif en le prenant à tort pour le colossal enfoiré qui a déjà fait trente victimes, un groupe d’une quinzaine de justiciers armés jusqu’aux dents de battes, de machettes et de flingues, réussissent l’exploit sans précédent de se faire tous massacrer par le tueur qu’ils encerclaient, alors qu’il était seulement armé d’un couteau.

Mais pas de panique ! Ceci n’a rien d’un navet car à la fin, les scénaristes nous expliquent enfin pourquoi il est impossible de tuer Myers : ce dernier est le Mal (ça on savait, Donald Pleasance nous l’avait déjà dit au moins vingt fois dans les deux premiers films) et il contamine les gens autour de lui en les rendant hystériques et agressifs (une métaphore subtile du covid et des débordements de l’Amérique trumpienne…). Mais encore mieux : plus Myers tue ou plus il semble se faire tuer, plus il est en mesure de ressusciter, plus fort que jamais.

La réponse au mystère Michael Myers, Halloween Kills nous la donne enfin : Myers est un super saiyen qui comme ses congénères San Goku et Vegeta devient plus fort à chaque fois qu’il se prend une raclée. C’est aussi simple que ça et ça explique tellement de choses dans la saga, sa façon de survivre après avoir été brûlé, éborgné, empalé, électrocuté et même décapité. Même un Highlander n’a pas le cuir aussi dur que Myers…

Bref, Halloween Kills n’est pas un bon film d’horreur ni même une bonne suite. Ce n’est même pas un bon slasher. En donnant une plus grande ampleur à son intrigue, David Gordon Green aurait voulu faire passer ça comme une variation originale de l’univers créé par Carpenter mais en l’état, son film n’est qu’un énième slasher bas du front et surtout une énorme parodie. Les personnages présentés dans le film ne font jamais illusion, ils ne sont là que pour se faire tuer, les scènes de meurtres s’enchainent sans la moindre inventivité, Jamie Lee Curtis ne sert à rien et le suspense est artificiel d’un bout à l’autre du film, lequel se révèle parfois involontairement risible. Et ne parlons même pas de cette longue scène d’hystérie collective, gênante tant elle s’éternise inutilement.

Quand on pense qu’ils ont zappé le très sombre Halloween 2 de Rosenthal et le respectable Halloween H20 de Miner pour nous servir cette daube, sous prétexte que c’est nouveau et que Big John en compose la musique avec son fils Cody, c’est vraiment se payer la gueule du monde.

Mais bon, il y a des meurtres dégueux, il y a Jamie Lee Curtis qui nous fait sa Sarah Connor sous xanax et il y a Michael Myers qui oberynise un gars à grande gueule qui s’appelle Big John… De la même manière, le réalisateur a multiplié les petits clins d’œil aux deux premiers films, uniquement pour le fan service bien sûr (Myers qui perd tous ses moyens quand on lui retire son masque, Myers qui plaque sa main sur la vitre de la voiture pour terroriser son ancienne infirmière, Myers qui hante les allées désertées d’Haddonfield après que Loomis lui a tiré dessus la première nuit, Myers qui égorge le vieux sherif comme il avait égorgé sa fille, Myers qui trouve le temps de tuer tout plein de gens sans jamais faire caca…)
Tout est là.
Le parangon du slasher raté.

Maintenant, je ne vous cache pas que je ne suis pas pressé de découvrir Halloween Ends. En attendant, je préfère revoir les trois premiers opus ainsi que le diptyque de Zombie. Ça au moins, c’étaient des films d’horreur bien écrits et flippants. Et (hormis Halloween 3 bien sûr) Michael Myers y avait vraiment de la gueule.

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