Cela fait maintenant plus de vingt ans qu’Hollywood ressert du fan service en veux-tu en voilà à l’attention de toute une génération de cinéphiles ayant grandi durant les années 80 et 90. Le problème est que cette mode du revival, si elle n’est pas loin d’atteindre ses limites (que reste-t-il des franchises d’alors à exploiter ?), a tendance à accoucher de suite/préquelle/remake souvent foirées. George Lucas aura donné le coup d’envoi en entachant ses propres créations d’une suite et de préquelles médiocres (Star WarsIndiana Jones) avant de les fourguer a Disney. Puis Terminator s’est perdu quatre fois de trop dans le temps (Cameron à la production du dernier a réussi l’exploit de faire pire que ses prédécesseurs), les Predators… (j’y reviendrai bientôt), Robocop s’est vu mis à jour et relooké façon Daft Punk, la créature polymorphe de The Thing s’est faite décongeler. Et ne parlons pas de l’opportunisme des remakes/suites des vieux slashers. En fin de compte, seul Ridley Scott semble s’en être plutôt bien tiré (et ce quoiqu’en pensent les détracteurs de ses préquelles d’Alien) en revisitant l’univers de ses deux plus grands films de SF.

Quand on étudie les cas de George Lucas avec sa prélogie Star Wars et son quatrième Indiana Jones, et de James Cameron avec son indigent Terminator : Dark Fate (les détracteurs de Prometheus/Alien Covenant ou peut-être de Blade Runner 2049 y ajouteront aussi le cas de Ridley Scott), on se surprend même à se demander si la vieille théorie du créateur cherchant à détruire sa création n’est pas fondée. Beaucoup (moi le premier) se sont imaginé pendant longtemps que certaines franchises ne pourraient être sauvées que par le retour de leurs créateurs aux manettes. Mais il s’avère qu’une fois de retour, lesdits créateurs n’ont fait que les enterrer. On comprend donc volontiers que Zemeckis ait déclaré ne jamais vouloir donner de suite à sa trilogie Retour vers le futur (de son vivant, a-t-il affirmé, personne n’y touchera. De son vivant…).

La prochaine étape ce sera quoi ? Un Gremlins 3 en CGI brocardant les dérives d’une Amérique wokiste et trumpienne à la gloire déclinante ?

Tout aussi culte mais moins transgénérationnel que la trilogie de Zemeckis, Ghostbusters est le parfait exemple du classique malmené par la mode du revival. Après un diptyque réussi mais qui n’avait plus grand chose à raconter, plus de vingt-cinq ans passèrent sans que quiconque à Hollywood n’ose envisager d’y revenir. Puis Paul Feig en a proposé une version féminisé sans comprendre que le succès du premier film s’expliquait essentiellement par son originalité dans le paysage cinématographique de son époque. La seule « originalité » du film de Feig : inverser bêtement les identités de genres de ses protagonistes en espérant que les gags de cette nouvelle mouture fassent mouche. Le résultat fut à la hauteur des attentes : de l’humour pas drôle, des caméos faiblards, un scénario paresseux et surtout, surtout, beaucoup de CGI. La mort d’Harold Ramis et le gros coup de vieux du restant du casting original semblant interdire toute idée de suite, le miracle vint finalement du carton de la série Stranger Things laquelle, s’inspirant des bonnes vieilles recettes ambliniennes et carpenteriennes, prouva au détour d’un épisode dédié à Ghostbusters que la ferveur des vieux fans pour le diptyque d’Ivan Reitman n’était pas encore morte.

C’est donc Jason Reitman, fils d’Ivan, qui hérita en toute logique d’un quatrième opus dont le scénario s’inspire, sans grande surprise du modèle Stranger Things. Une bande de gosses dans un patelin paumé d’Oklahoma affronte une force occulte menaçant d’envahir le monde et se voit aidée par leurs ainés pour anéantir la menace. Bref, tout ce qu’on trouvait déjà dans le Super 8 de J.J. Abrams.

Ghostbusters : Afterlife est un divertissement sympa et ultra-référentiel basé sur un scénario prémâché pour les fans et donc prévisible de bout en bout. Bourré de clins d’oeils et de caméos, le film nous annonce tout au long de ses deux heures un acte final censé confronter de nouveau Gozer aux stars restantes du film original. Le vieux fan prendra donc plaisir à retrouver l’univers de Ghostbusters transposé cette fois-ci dans un cadre rural, et s’amusera à compter les références plus ou moins subtiles au premier film (la ville de Summertown en clin d’oeil à la région antique de Sumer dont Gozer est censé avoir été une des divinités, les bras sortant du fauteuil, le sérieux de Phoebe semblable à celui de son grand-père Egon, le geek Podcast et son enthousiasme à la Ray Stantz, la possession des deux minions de Gozer, la pulvérisation finale des mini-Bibendum dans une expression ahurie semblable à leur aîné, et bien sûr le test des cartes de Zener revu par Dana Barrett). Le vieux trentenaire, pourtant désabusé par la floppée de films du même genre ayant ponctué les années 2010, saura même trouver une appréciable référence aux Gremlins de Joe Dante en voyant ces petits marshmallows sur pattes s’entretuer joyeusement jusqu’à finir broyés dans un mixeur.

Mais au bout du compte, que retenir de cet ultime opus si ce n’est sa floppée de références ?

Porté par la réalisation respectueuse de Jason Reitman, ce SOS Fantômes : L’Héritage ne séduit le fan que par son statut d’arlésienne et s’oublie rapidement après visionnage. Il ne propose rien d’innovant et s’apparente moins à un film qu’à un produit parfaitement calibré pour séduire une génération de milléniaux, lesquels en ont peut-être un peu marre de se voir resservir les vieilles soupes dans de nouveaux plats. Quant aux plus jeunes qui ne connaissent pas les premiers opus, ce ne sont pas les jeunes protagonistes de l’histoire qui les aideront à mieux cerner cet alignement de clins d’oeils et de caméos.

Que dire de plus ? C’est sympa, ça se regarde, ça s’apprécie puis ça s’oublie facilement. Et viendra ensuite un jour où l’on ne se souviendra même plus l’avoir vu.

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