Hudson Hawk, c’est le film que j’espère toujours apprécier un peu plus à chaque fois que je le revois, sans jamais y arriver. Elaboré sur la base d’un pitch imaginé par Bruce Willis, le scénario de Steven E.De Souza (Die Hard) et Daniel Waters (Batman Returns) semble avoir été écrit et réécrit un long soir de cuite entre aficionados de la ZAZ. Au départ, il s’agit d’une banale intrigue aventureuse mettant un cambrioleur fraichement libéré de taule aux prises avec un couple de milliardaires machiavéliques voulant faire main basse sur un ersatz de pierre philosophale censée transformer le plomb en or. Le truc aurait pu être traité de différentes façons : thriller historique à tendance délirante, comédie musicale burlesque façon Blues Brothers, parodie d’action méta à la Last Action Hero, ou simple comédie d’aventures au premier degré.

Au final, Hudson Hawk mélange un peu de tout ça pour devenir un produit inclassable, si atypique dans la forme qu’il demeure toujours aussi fou trente ans après sa sortie. Pour autant, si ce mélange des genres et des tons a a priori tout pour séduire sur le papier, à l’écran il n’en va pas toujours de même, la faute a un script en roue libre qui alterne les idées hilarantes à celles totalement nazes et balade constamment le spectateur d’une digression à une autre, sans jamais craindre de le perdre en route. Le scénario, tout particulièrement, équivaut à un enchainement de séquences qui, si elles sont totalement décalées, finissent aussi par étouffer l’humour sous le poids du too much et de l’absurde. Hudson Hawk fait ainsi penser à un joyeux fourre-tout raconté sur différents tons et gavé jusqu’à la gueule de personnages tous azimuts, joyeusement réunis autour d’un héros aussi paumé que le fut en son temps Jack Burton.

Mais l’ensemble offre quand même de très bons moments et beaucoup d’idées aussi délirantes qu’originales, comme ce cambriolage chronométré sur le Swinging on a star de Bing Crosby, le running gag facile du cappuccino ou encore cette scène géniale où Hudson et Eddy, les corps drogués et immobilisés, s’engueulent dans des postures ridicules. On appréciera également le savoureux numéro de son trio de comédiens principaux, Bruce Willis et le regretté Danny Aiello s’amusant visiblement beaucoup à jouer les dindons de la farce quand Andie MacDowell égratigne joyeusement son image en jouant les nonnes (forcément) prudes et parlant couramment le dauphin. On y trouve aussi une belle galerie de vilains : James Coburn cachetonne avec malice dans la peau d’un vieux salopard de la CIA évoquant son rôle dans Notre homme Flint, Frank Stallone (le frangin de Sly) en fait des caisses en mafioso teigneux, et David Caruso, encore très loin de ses punchlines des Experts, hérite du rôle ingrat de l’espion/mime (et muet) Kit Kat. L’anglais Donald Burton joue savoureusement des lames rétractables et Benny, cette petite teigne, nous gratifie du plus beau vol plané animalier en gobant sa baballe. Seul bémol, le cabotinage excessif de Richard E.Grant et Sandra Bernhard, certainement le couple d’antagonistes le plus agaçant de l’histoire du cinéma hollywoodien.

Gros four commercial à sa sortie en salles, qui faillit d’ailleurs coûter sa carrière à Bruce Willis, Hudson Hawk a depuis trente ans largement conquis ses galons de film culte. Un OFNI intemporel et impossible à catégoriser, qui ne compte d’ailleurs à ce jour aucun équivalent. Pas de quoi hurler au génie cinématographique bien sûr mais assez de bonnes raisons pour passer un agréable moment. Et rire… ou sourire… si tant est qu’on ait assez d’humour pour adhérer au délire.

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