Jeune recrue du FBI, Johnny Utah doit faire équipe avec le vieux briscard Angelo Pappas pour identifier et arrêter le gang des “anciens présidents”, des braqueurs de banques opérant à Los Angeles. Pappas est persuadé que ce gang évolue dans le milieu très fermé des surfeurs. Suivant l’intuition de son équipier, Johnny décide d’infiltrer le milieu pour en savoir plus. Il rencontre alors la belle Tyler et fait bientôt connaissance avec le mystérieux Bodhi.

Seconde incursion dans le genre policier pour Kathryn Bigelow, Point Break compte aujourd’hui parmi les polars hollywoodiens les plus emblématiques des années 90. Produit et co-écrit par W. Peter Iliff et James Cameron (alors époux de Bigelow), et sorti un an à peine après le précédent film de sa réalisatrice, ce long-métrage singulier, aux allures de trip mystique et musclé, reste surtout connu pour le duel qu’il offre en tête d’affiche et la formidable bromance au centre de son intrigue. Désireux de s’engager sur des projets plus “virils” et explosifs que ses précédents succès (Dirty DancingGhost), Patrick Swayze brillait dans le rôle du légendaire Bodhi, leader gourou d’une bande de surfeurs-braqueurs, tout entier tourné vers “la vague”, une forme de philosophie épicurienne et anti-matérialiste. L’acteur s’impliqua tellement sur le tournage du film qu’il tint à faire lui-même certaines de ses cascades (la séquence en chute libre est en partie non truquée). Face à lui, Keanu Reeves s’imposait à merveille à contre-emploi dans le rôle d’une jeune recrue du FBI, un brin tête brûlée, très loin de ses débuts dans les teen comedies. Un formidable duel de stars auquel s’ajoutaient les prestations savoureuses de Lori Petty (superbe en surfeuse cogneuse), John McGinley (détestable en chef du FBI à grande gueule), James LeGros (en mode cool-attitude), Tom Sizemore (alors acteur fétiche de la réalisatrice) et surtout Gary Busey (excellent en mentor rigolard). On notera aussi la participation anecdotique d’Anthony Kiedis (leader des Red Hot Chili Peppers) dans le rôle d’un petit truand au look singulier.

Après les sympathiques Near Dark et Blue Steel, Kathryn Bigelow livrait là un de ses films les plus aboutis dont les images restent toujours aussi sensationnelles aujourd’hui. Très loin des maladresses formelles de son précédent film, la réalisatrice faisait montre ici d’un savoir-faire indéniable et n’hésitait pas à affirmer son style via des prises de vue assez atypiques pour l’époque. Si les séquences de surf (et leurs formidables vagues déferlantes) restent à ce jour les plus impressionnantes du cinéma, le morceau de bravoure du film reste bien sûr cette formidable course-poursuite centrale, particulièrement immersive car filmée en caméra portée et du point de vue de Johnny Utah alors que celui-ci poursuit Bodhi au travers de différentes venelles et habitations de Los Angeles. Une manière d’annoncer les prises de vue captées à la première personne du film suivant de Bigelow, le fascinant Strange Days. Outre le talent de sa réalisatrice, la réussite de Point Break doit aussi beaucoup à la qualité de sa musique (composée par Mark Isham) et à la superbe photographie de Donald Peterman, qui rendait ici parfaitement justice au style crépusculaire et contemplatif de Bigelow.

Bien sûr, le film n’est pas exempt de défauts (le scénario est somme toute assez simpliste) et reste visuellement très représentatif de son époque. Grand succès commercial lors de sa sortie en salles, Point Break a ensuite très vite conquis ses jalons de film culte au fil des années. En France, c’est surtout la parodie crétine Brice de Nice qui l’aura fait redécouvrir durant les années 2000, le héros neuneu campé par Jean Dujardin faisant une véritable fixation sur la spiritualité de Bodhi, en en dénaturant le sens (le personnage attend toujours sa vague sur la plage de Nice). En 2007, c’est le génial Hot Fuzz d’Edgar Wright, autre bromance assez réjouissante, qui clignera ouvertement de l’oeil au classique de Bigelow en revenant sur une de ses séquences les plus connues. Et comme la garce Hollywood aime recycler inutilement ses vieux succès, elle en proposera un premier remake officieux en 2001 avec le premier volet de la saga Fast and Furious qui calquera sans scrupules toute son intrigue sur celle du film de Bigelow, en troquant juste le surf pour les voitures tunées. En 2015 sortira un remake, officiel cette fois, bourré de cascades truquées en CGI façon Fast and Furious, et très loin des cascades réelles et de la splendeur du film de Bigelow. Lequel reste toujours assez magnifique trente ans après sa sortie.

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