Imaginez…

Une adaptation de Venom, noire, angoissante et brutale. Le genre de film à bousculer le petit monde tranquille des comic books movies comme l’ont fait The Dark KnightWatchmenLogan et Deadpool et qui nous vengerait enfin du Venom râté de Sam Raimi dans Spiderman 3.
Imaginez une histoire où Tom Hardy incarnerait un Eddie Brock brisé, en pleine déshérence et venant de découvrir qu’il était condamné par la maladie. Imaginez une entité extra-terrestre effrayante, exilée sur Terre et errant à la recherche d’un humain compatible auquel se greffer. Un monstre symbiotique dévorant le corps et les âmes de ses hôtes successifs jusqu’à ce qu’il s’empare d’Eddie et le sauve de son mal. L’ambivalence de cette fusion et la dualité de la créature et de son hôte, perpétuellement en lutte pour garder le contrôle l’un sur l’autre.
Imaginez enfin Venom, une créature évoluant d’abord à l’ombre des ruelles, s’en prenant à deux trois innocents de passage avant qu’Eddie ne réussisse à trouver un compromis pour satisfaire le monstre affamé : s’en prendre aux criminels, nettoyer les rues d’une métropole crasseuse, rongée par le crime et où sévirait aussi un tueur en série qui finirait par échouer dans la même cellule qu’Eddie.
Imaginez des mises à mort cruelles, comme on en trouvait dans Logan, des sacrifices étonnants, des cris, du sang et de la rage. Oui essayez d’imaginer tout ça et ce que ça aurait pu donner à l’écran avec un réalisateur un tant soit peu concerné et des producteurs intègres.
Puis regardez le buddy movie horrifico-super-héroïque de Ruben Fleischer en essayant d’apprécier son humour bas du front, l’indigence de ses dialogues, la pauvreté de la réalisation, la bêtise de protagonistes archétypaux, l’absence de toute violence graphique et un tant soit peu réaliste, l’énorme travail de dame ciseaux sur toutes les scènes de mises à mort. Confié à Kelly Marcel (déjà coupable du script de 50 nuances de Grey), le scénario aligne les raccourcis faciles tout en s’enlisant dans un schéma narratif d’une banalité affligeante (la structure du film est quasiment la même que celle de The Mask sorti il y 25 ans). Perdu au milieu du marasme, Tom Hardy se démène comme il peut pour sauver les meubles, composant un “gentil” Eddie Brock à la ramasse, amoureux transi en pleine reconquête de son ex et qui se découvre un nouveau poto de l’espace.

Que dire de plus ? Venom est un énorme gâchis, un doigt d’honneur tendu par Avi Arad à Marvel et à tous les lecteurs du comics, une entreprise opportuniste pour ratisser large sur les recettes en édulcorant le plus possible le spectacle et en l’adaptant à un public peu exigeant. Venom est un film puant la bêtise hollywoodienne, celle qui rapporte beaucoup de thunes en se foutant de son public. Et qui sacrifie au passage toute espèce d’ambition artistique sur l’autel du dieu dollar. C’est un condensé de tout ce qu’il ne fallait surtout pas faire avec le personnage créé par Todd McFarlane. Et qu’on ne vienne pas prétexter qu’il y a eu des coupes et que le pauvre Fleischer n’a pas pu livrer le film qu’il voulait. Ce qui compte au final c’est ce qu’on voit à l’écran : un navet sidéral et sidérant de connerie.

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