Alors qu’ils s’apprêtent à déménager et fuir leur cité désaffectée promise à une démolition prochaine, Tommy est témoin, impuissant, de l’agression de sa jeune femme enceinte jusqu’aux yeux, par une bande de jeunes encagoulés et au coup de seringue facile. Quelques mois plus tard, c’est un Tommy devenu agoraphobe que l’on retrouve reclus chez lui, seul à s’occuper de sa petite fille. Dernier occupant recommandable de la cité, il devra bientôt faire face au retour de la bande de jeunes bien décidés à lui prendre son enfant.

Pour son premier long-métrage, Ciaran Foy décide de traiter de l’agoraphobie, maladie dont il fut longtemps victime suite à une agression gratuite dans sa jeunesse. Pour ce faire, il resserre son récit sur le point de vue désespéré de son protagoniste, et empreinte un temps les contours du thriller urbain pour mieux perdre son spectateur dans un dernier acte entièrement tourné vers le fantastique allégorique.

Un brin nébuleuse dans la figuration de ses antagonistes, son intrigue se focalise via une ambiance oppressante sur la peur ressentie par son personnage avant que les événements ne le force à l’affronter. Foy sollicite ainsi grandement l’empathie du spectateur vis-à-vis de son protagoniste, rendant presque tangible la maladie dont il souffre. La représentation confuse des lieux et des personnages, reste déterminée par le point de vue torturé du protagoniste.

(Risque de spoiler) Mais il est aussi question de culpabilité dans Citadel. Celle pour Tommy de ne pas être à la hauteur pour défendre ceux qu’il aime. Celle de ne pas être aussi solide et téméraire que ce vieux prêtre, figure autoritaire par excellence. Il suffit de voir comment le personnage du cureton est introduit dans l’histoire, de manière hostile, presque comme un agresseur. Ce sont donc plusieurs êtres aimés que Tommy se voit incapable de défendre, jusqu’à se révolter et passer outre l’intimidation du vieux patriarche pour mieux solliciter son aide.

Ainsi, l’intrigue se focalise sur un premier catalyseur pour expliquer la trajectoire pathétique de son héros, puis sur un second élément déclencheur (le rapt de son enfant) pour l’en tirer. La trajectoire dramatique du protagoniste épouse parfois celle du personnage de Cillian Murphy dans 28 jours plus tard. Impuissant et passif durant l’essentiel du métrage, il s’impose dans son dernier acte comme une véritable figure héroïque, totalement implacable en plus d’être un digne successeur au patriarche sacrifié (ici James Cosmo, dans 28 days… Brendan Gleeson).

C’est donc véritablement à une quête initiatique que nous convie Ciaran Foy, celle d’un jeune homme immature confronté à ses peurs du monde, de l’avenir incertain, de la solitude et de la paternité et qui reviendra métamorphosé de son voyage intérieur jusqu’à détruire lui-même cette triste citadelle, symbole d’un passé à jamais accepté et révolu.

Citadel est un de ces films que l’on peut soumettre à plusieurs interprétations. Non exempt de défauts propres à un premier film, parfois maladroit dans son propos (au point que certains y auront vus à tort un discours réactionnaire sous-jacent), l’oeuvre se regarde comme un récit cathartique, une parabole sur cette peur inconsidérée du monde qui fige parfois les existences.

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