Un illusionniste de Vegas, de mèche avec la pègre, devient le principal témoin dans un procès contre le dernier parrain de la cosa nostra. Sa tête est alors mise à prix par le-dit parrain qui souhaite entre autre chose qu’on lui rapporte le coeur du traître. La récompense est d’un million de dollars et la nouvelle a vite fait de circuler dans le milieu. Bientôt ce sont les pires tueurs du monde qui se mettent en tête d’empocher la récompense, mettant le FBI en fâcheuse posture. Tout ce sympathique petit monde finit bientôt par investir un hôtel de luxe de Vegas, au sommet duquel s’est calfeutré le traître.

Mise à prix se présente comme un polar d’action formellement déroutant qui fait s’entrecroiser une multitude de personnages stéréotypés lesquels ne tardent pas en s’entre-tuer aux détours des couloirs d’un immense palace. Joe Carnahan s’éloigne radicalement de la sobriété de son précédent polar Narc, pour livrer ici un film démesuré et parfois un rien excessif. Ainsi la réalisation fluide et stylisée met-elle un point d’honneur à présenter dans une exposition bavarde et donc trop explicative, une succession de personnages à l’importance secondaire (tous sont des tueurs ayant plus ou moins le même objectif) dont la plupart se voient balayés manu-militari du script dès lors que le scénario ne sait plus qu’en faire.

Car le principal défaut du film est là, dans un scénario de commande décousu qui complique inutilement une intrigue minimaliste au possible par une profusion de personnages secondaires parfois inutiles et vite sacrifiés. Ainsi, l’enjeu principal (tuer le traître ou le protéger) devient vite confus selon les points de vue abordés (jamais définitif) et la résolution dénote fortement avec tout ce qui a précédé de par son parti-pris dramatique.

De plus, ce qui porte cruellement préjudice à l’ensemble c’est sa totale absence de personnage-référent. Le spectateur ne sait ainsi pas à quel point de vue se raccrocher tant se scénario se perd à entremêler les trajectoires de tous ses protagonistes, flics comme tueurs. Ici tous les personnages semblent secondaires, y compris celui qui justifie toute l’intrigue, illusionniste déluré dont les crises de nerfs finissent vite par agacer.

En outre, ne croyez pas voir en ce film un ersatz des films de Guy Ritchie dans lesquels l’humour contrebalance constamment le bodycount. Carnahan n’hésite que rarement entre premier et second degré et lui préfère amplement le premier, alourdissant parfois le récit d’un pathos inutile lors de la mort de personnages dont on se fiche finalement complètement tant on n’en sait rien ou très peu.

Plus cruel et violent que simplement délirant, Smokin’ Aces se présente donc avant tout comme un jeu de massacres qui consiste à enfermer toute une tripotée de personnages antipathiques dans une seule unité de lieu et d’attendre qu’ils s’entre-tuent. Ajoutez à cela un personnage que le récit garde à distance sans jamais savoir qu’en faire (pour le ressortir de son trou à la fin) et vous aurez une idée de l’indigence du scénario. D’autant que l’intrigue s’achemine inévitablement vers un twist attendu et sans aucun réel impact sur tout ce qui a précédé.

De même, la distribution aurait amplement gagnée à s’alléger de quelques “stars”. Certains rôles ne semblent servir qu’à mettre en vedette les acteurs et les chanteuses qui les incarnent. Je râle peut-être un peu trop car le film ne manque pas de qualités et d’audaces mais j’en attendais beaucoup plus de la part du réalisateur de Narc et de The Grey.

Au final, Mise à prix est un objet curieux, globalement décevant mais pas moins doté de qualités indéniables dont une des moindres est la réalisation de Carnahan. Le réalisateur tire continuellement vers le haut un film qui aurait tout eu du navet évident sous l’objectif d’un autre tâcheron. Sorte de polar mosaïque débordant de personnages et de dialogues pour pas grand chose, le film se regarde et s’oublie aussitôt venu son générique de fin.

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