La trilogie Scream s’était conclue de manière décevante. Les crimes de Ghostface ont, depuis Scream 3, largement été dépassés par les exactions cinématographiques de multiples tueurs remakés façon brut de décoffrage ou bourreaux adeptes du torture porn, tout cela le temps d’une décade sensiblement plus jusqu’au-boutiste que les tranquilles années 90. Le néo-slasher n’ayant par survécu à la fin de la franchise qui l’aura vu naître, il était relativement inepte de proposer un quatrième Scream à l’aune du climat et du ton résolument plus viscéral du cinéma d’horreur des années 2000-2010.

C’est pourtant ce qu’a fait Craven, retrouvant pour l’occasion l’essentiel de l’équipe d’origine, Williamson compris. Ce dernier, appuyé par Ehren Kruger, propose de revenir à la ville de Woodsboro et de retrouver les survivants plus de dix ans après la mort du dernier Ghostface. Sydney ayant depuis acquis le statut d’écrivain à succès, elle revient dans sa ville natale et retrouve aux détours de la promotion de son dernier ouvrage ses anciens amis. Son retour provoquera aussi la résurgence d’un nouveau tueur au masque hurlant, lequel semble bel et bien décidé de faire de Sydney sa principale victime en commençant par zigouiller comme ses prédécesseurs, tout ceux qui gravitent autour d’elle.

Rien de nouveau sous le ciel de Woodsboro, si ce n’est l’ambition de traiter à nouveau du sempiternel décalage fiction/réalité annoncé par une ouverture qui, si elle ne se hisse pas au niveau de l’excellence de celles des deux premiers films, a le mérite de surprendre le spectateur en le perdant sur trois strates de réalités successives (Influence Inception ?). S’ensuit alors le traditionnel whodunit étalé sur tout un métrage, présentant une galerie de nouveaux personnages qui pour la plupart ont bien plus de substances que ceux du troisième film. Le traitement étant sensiblement le même que ses prédécesseurs, Williamson étaye son propos en dressant parallèlement à l’intrigue un bref état des lieux du cinéma d’horreur actuel. Le genre n’ayant pas chômé depuis le dernier balbutiement de Scream 3, il est intéressant de voir que les auteurs ne traitent que partiellement du genre dans sa globalité pour ne se pencher que sur les derniers slashers en date. Et là, force est de constater que la dernière décennie ne se résume qu’à une vague de remakes opportunistes plus ou moins bien emballés d’anciens slashers, et aux exactions cradingues de bourreaux sadiques. Craven ne cache pas son mépris pour l’évolution du genre au détour de quelques répliques plus ou moins bien senties.

Pour autant Scream 4 n’innove pas dans le genre. Tout au plus apporte-t-il matière à bouleverser certains codes établis ayant depuis évolués.
Ainsi, assiste-t-on à un film prenant plus pour référence ses premiers opus (dans la manière qu’à le tueur de reproduire et détourner les méfaits de Billy Loomis) que le genre qui l’a vu naître, Craven ayant d’ailleurs toujours eu cette propension à s’auto-citer. N’ayant pas assez d’exemples cinématographiques récents sur lesquels s’appuyer, Craven et Williamson choisissent d’étayer leur propos sur l’importance qu’à pris internet et youtube sur le quotidien actuel et s’en servent comme principal médium du tueur. Ainsi, ce dernier choisit-il de filmer et poster ses exactions en vue d’accéder au statut facile de star du web, le propos final du tueur étant que n’importe qui aujourd’hui sans une once de talent peut transcender son statut anonyme et sortir de l’ombre en se servant du web. L’argument est évidemment critiquable d’autant plus qu’il est tenu par l’assassin, mais il suffit de se remémorer certains faits divers pour lui trouver une pertinence toute relative.

Au-delà de ce propos à peine esquissé par le scénario, l’intrigue ne captive jamais vraiment. Ainsi, le scénariste ne fait-il qu’annoncer ses victimes sans pousser l’audace jusqu’à sacrifier des personnages de la trilogie initiale. A peine détourne-t-il les fameuses règles établies sans jamais surprendre le spectateur blasé par toute la décennie qui aura précédé. Dès lors, la révélation finale reste prévisible malgré la volonté farouche de Craven de confondre son public en privilégiant les fausses pistes convenues (voir comment Hayden Panettière réagit à la présence de Sydney ou l’attitude inquiétante de Marley Shelton lors de sa rencontre avec cette dernière).

Mais ce qui est dommageable au film tant il le rapproche plus du troisième opus que des deux premiers, c’est ce second degré rédhibitoire qu’a fini par impliquer le concept de mise en abîme. Il suffit de voir cette scène de meurtre, très drôle au demeurant, mais tout à fait hors de propos dans le contexte global où un jeune homme poignardé par le tueur, l’implore de l’épargner en avançant qu’il est gay (et donc intouchable si l’on en croit les règles énoncées auparavant), une réplique qui fige un instant le tueur dans une posture de confusion. Tout l’élément comique est là, l’attitude du meurtrier à cet instant le rapproche plus d’un Ghostface de Scary movie que de Scream. Il y a aussi le flic qui avant de mourir insulte Bruce Willis dans le statut de flic héroïque et increvable qu’il a toujours incarné. C’est drôle mais ça flingue la crédibilité.

Reste au final un film appréciable pour le cheminement balisé de son intrigue et la nostalgie que son titre peut encore provoquer, relativement meilleur que le troisième opus mais bien en-deçà de la qualité des deux premiers films. Ghostface a-t-il passé là son dernier coup de fil ?

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